Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
A tout hasard.
A tout hasard.
Publicité
Archives
Derniers commentaires
19 janvier 2009

Celà fait.

"- Raconte-moi le bonheur. "

Il m'a dit ça, comme ça, d'une traite, sur son lit d'hôpital. Pépé Jacques, allongé, me tenant par la main, tremblant. Raconte-moi le bonheur. Je l’appelais Pépé, quoi qu’il fût mon père. Lui qui ne m'a jamais vu, lui qui est aveugle depuis bientôt 50 ans. Susurrant, à mon oreille, ces quelques mots couleurs ouragan.
Je me tus. Je fermis les yeux. Je réfléchis profondément. Je savais que si j’étais ici, c’était parce que Pépé aller mourir. Certes, il avait 90 ans, il avait eu une belle vie. Il fallait que je trouve quelque chose à lui dire, d’intelligent. Alors je me penchais vers lui et lui dit doucement:
« - Je vais te raconter l’histoire du bonheur, pépé. L’histoire du bonheur, sous toutes les formes inimaginables, toutes les couleurs que tu ne vois pas, toutes les formes que tu devines, toutes les odeurs que tu sens. Un bonheur d’enfant, un bonheur d’adulte. Le bonheur tout court. »
Il releva un peu plus sa tête et me dit, marmonnant ces mots : « Ah ? Très bien. »

« - Le bonheur, pépé. Tout ce que nous voulions, c’était le bonheur. Du bonheur sans failles, sans limites, du bonheur zéro tache. A 6 ans, on construisait des cabanes, on buvait du chocolat chaud, on jouait à trap-trap, et ça nous suffisait. Puis on a grandit. Nous avions 14 ans. Nous étions heureux, beau, jeunes, et surtout nous étions libre. Mais cela ne nous suffisait plus. Nous cherchions tant bien que mal à atteindre l’extase éternelle, à travers des bien matériaux. Nous nous forcions à sourire, nous nous forcions à être de parfaits citoyens. Et pourtant, au fond de nous, nous savions que nous avions torts.
Vint alors, à l’époque de mes 18 ans, la révélation. Plus que l’amour, plus que la haine, plus que tout les Mac Flurry et que tout les biens matériaux de cette foutue planète, le bonheur. Chacun de nous avaient sa propre version de cette jouissance que nous voulions atteindre. Mais tout ce que nous savions, c’est que cela nous tombait parfois sur la tête, sans explication. Qui, d’ailleurs, aurait pu expliquer notre euphorie de l’instant ? Cela ne durait jamais assez longtemps. Un jour, tout retombait. Nous voulions des sentiments forts. L’amour de l’autre. Une amitié fusionnelle. Nous voulions des sensations fortes. Plonger du haut d’une falaise. Voler. Fuguer. Ou tout simplement être assis avec des amis, et écouter de la musique.
Et puis on a vieillit. J’ai eu 25 ans, j’ai rencontré Laurent. Laurent, tu t’en rappelles, n’est ce pas ? Tu t’opposais à notre union. Nous nous étions mariés en secret. Moi, avec ma robe blanche de princesse, lui en costard. Je me suis dit que le bonheur, c’était peut être seulement être au bon moment, avec la bonne personne, au bon endroit. Puis nous avons eu Morgane. Etre enceint, quoi qu’on dise, est la chose la plus douce qui soit. Le bonheur, c’était ça, pour moi. Avoir un petit être au creux de mes reins. J’ai divorcé 3 ans après avoir eu Morgane. J’ai très vite rencontré Jean-Yves, et rebelote ! Un autre bébé, un autre enfant à aimer. Et Jean Yves, il est toujours là, avec moi. Pendant plus de 10 ans, j’ai vécu sur l’idée que le bonheur, c’était ça. Que le bonheur, c’était de l’amour. Que de l’amour. Au bon moment, au bon endroit.
Mais maintenant, pépé, maintenant. J’ai 46 ans. Morgane et Jade peuvent se passer de moi. J’ai changé mon opinion du bonheur. Le bonheur, c’est de ramasser les miettes, ou le sucre, avec le doigt, sur la table de la cuisine. Le bonheur, c’est l’odeur du safran, des épices, le bonheur c’est de passer mes doigts à travers la semoule, le bonheur c’est m’allonger dans l’herbe, le bonheur c’est de recevoir une lettre, le bonheur c’est de recevoir un baiser, le bonheur c’est de manger du chocolat en écoutant de la musique. Le bonheur c’est le rouge parfait d’une pomme, le vert de l’herbe, le bleu du ciel. Le bonheur, c’est le pot d’or au bout de l’arc en ciel. Le bonheur, c’est trouver la lumière, au fond d’un tunnel noir. Tu comprends, pépé ? Je ne peux pas te raconter le bonheur. Ca te tombe dessus, sans prévenir, il suffit de savoir le saisir.  »

Pépé avait eu ce qu’il voulait. Mourir dans le bonheur.

Thème de Klervi.

SDC13483

Et toi, c'est quoi le bonheur ?

Publicité
Publicité
Commentaires
E
Han ton texte est extraaa. Tu as vraiment de l'avenir pour l'écriture, franchement.
L
C'est la liberté; c'est quand on est au dessus de tout; c'est quand on frôle la perfection ; c'est quand on a rien à se reprocher ; c'est un genre d'Everest à escalader.
K
le bonheur est un nuage d'amour parfois ignoré
C
Je peux pas le décrire. Je peux te donner la définition d'un dico, de miliers de personnes mais moi c'est juste paf! et puis j'ai envie de sourire de dire à tout le monde bonjour, de faire la cuisine, de danser, de chanter comme un pied, faire des projets, chanter sous la pluie, me rouler dans l'herbe... Tant de choses représentantes du bonheur.
K
Alors là, ouah.<br /> Tu m'en as mis plein les yeux. Mon thème n'était pas des plus faciles. <br /> "Raconte moi le bonheur, avec ses couleurs, ses odeurs, sous toutes les formes possibles et inimaginables, le bonheur d'enfant ou d'adulte, comme ça te chante."<br /> Ma Julie, si tu continues, tu vas écrire des choses merveilleuses.
Publicité